samedi 26 novembre 2011

Pourquoi Moché n'a-t-il pas pu entrer en Terre d'Israël?

Cette question ne peut pas laisser indifférent...
Comment se fait-il que Moché ait subi un tel revers de la part de Hachem après tout ce qu'il a fait pour le peuple d'Israël?  Alors vous allez me dire: "C'est écrit! C'est parce qu'il a frappé sur le Rocher au lieu de lui parler!". Mais entre nous, honnêtement, vous trouvez que c'est une raison suffisante?
Rav Fohrman nous propose une enquête époustouflante à travers les textes de la Torah afin de répondre à cette question épineuse.

Vous trouverez le cours ici: R.D.Fohrman_Moses.pdf
Cette retranscription est le résultat d'un travail de longue haleine. Je remercie en particulier ma femme et mon beau-frère Arié pour le temps qu'ils ont passé à me relire.
N'hésitez pas à laisser des commentaires, questions - que j'essaierai de traiter et/ou faire remonter à Rav Fohrman.
Naty

16 commentaires:

  1. J'en suis a la première partie, g du mal avec le kal vahomer de rachi .

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  2. Bonjour Moïse,
    Oui, c'est vrai, ce Kal Vahomer n'est pas évident! Pourrais-tu expliciter la difficulté que tu y trouves afin qu'on puisse t'aider?
    A bientôt!

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  3. "Si déjà un simple rocher écoute son créateur, sans aucune action extérieure, sans aucune contrainte,
    simplement parce que c’est NATUREL, alors à plus forte raison, nous, des hommes qui entrons en
    Israël, devons-nous écouter notre créateur."
    Mais la question reste entière! nous ne sommes pas des rochers, c'est naturel d'écouter son créateur, mais le rocher n'a pas dans sa nature de bon ou mauvais penchant, n'a pas de fierté, alors pourquoi cela est il comparable à l'Homme?

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  4. Salut Moché! Je me suis posé la même question que toi figure-toi...

    Remarquons une chose: Rachi insiste sur le fait que le rocher ne parle pas et n'entend pas, et ça soutient son kal va'homer. Il me semble que ça prouve que Rachi ne compare pas ici l'aptitude d'obéissance du rocher à celle des hommes. Sinon, il ne dirait pas qu'il est sourd (pour être sûr d'être bien compris: si on parlait d'obéissance, les Bnei Israël auraient dit "waw, le rocher a écouté et obéi!". Mais s'il est sourd, c'est que le raisonnement est sur un autre plan...)

    Dès lors, je pense, pour aller dans le sens de Rav Fohrman, que le kal va'homer ne doit pas se comprendre sous l'angle "si déjà il obéit, alors à plus forte raison dois-je obéir!". Il serait plutôt de l'ordre de ce qui suit: "si déjà un rocher s'inscrit aussi harmonieusement dans le projet divin, alors qu'il n'a même pas de récompense, à plus forte raison moi, qui en plus aurai une récompense, ai-je envie d'en faire partie!". Dès lors, la différence "ontologique" (désolé, j'ai pas trouvé mieux) entre un rocher et un être humain ne casse plus le kal va'homer, comme dans ta question. Elle le renforce. On ne parle pas de bon ou mauvais penchant, on constate qu'il n'a aucun intérêt à participer au projet et pourtant il le fait, au point de nous sauver la vie. Alors nous, certes nous avons un mauvais penchant, mais ça donne envie de participer à cette harmonie. Et en plus, nous avons des récompenses!

    Je ne sais pas si j'ai été clair.

    Pour être honnête, je garde une difficulté sur Rachi: pourquoi dire que le rocher ne parle pas? Quel intérêt?

    Peut-être pour dire: en plus, il n'a pas d'interaction possible avec le divin, il ne peut donc pas "participer" au projet. Alors nous, qui pouvons y participer, c'est d'autant plus extraordinaire de s'y intégrer ! Mais si c'est ça, c'est que Rachi avait un sacré esprit de la synthèse! Honnêtement, je pense qu'il y a quelque chose de plus "simple". Mais je ne vois pas. Une idée?

    Arié

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  5. Arié,
    Si je peux me permettre... En fait "Eino Médaber Véeino Choméa'" est une expression courante, en particulier dans le Talmud. Il me semble que cela signifie simplement qu'il s'agit d'un sourd de naissance donc forcément muet. On parlera sinon de "Médaber Véeino Choméa'".
    Je crois, pour faire simple, que Rachi veut juste mentionner qu'il s'agit d'un élément qui n'a jamais entendu - le fait qu'il ne parle pas n'en est qu'une conséquence, mais le langage pragmatique du Talmud l'appelle aussi 'Eino Médaber".
    Bon, je ne sais pas si j'ai embrouillé l'affaire; ce que je veux dire c'est qu'il n'y a pas à se prendre la tête sur ce "Eino Médaber"...
    Make sense?

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  6. Bonjour, j'ai bien reréfléchi au Kal vah'omer, merci arié de m'y avoir poussé.
    j'entend ce que dit arié, mais quelle différence entre "s'inscrire dans le projet divin" et "obéir à la parole de son créateur?" Pharaon lui même s'inscrit dans le projet divin, mais on ne peut pour autant apprendre de ses actes une vertu particulière.
    Je crois bien qu'il s'agit d'obéissance, de faire ce que Hachem attend de nous, ou s'inscrire dans le projet divin "du côté des gentils" (tout ça revient au même selon moi).
    Mais le point crucial de ce kal vah'omer est le tsad hashavé (denominateur commun) qu'il faut trouver, entre le rocher et les bbei israel dans le désert; je pense que c'est simplement que les deux sont des créations de Hachem qui ont quelquechose d'encré vous allez comprendre plus loin .
    Et je pense Naty, et ça reste une interprétation perso, que "parler, entendre et se sustenter" ont leur importance: il s'agit de trois niveaux dans l'Être, trois niveau de créatures du plus élevé au moins élevé:
    1°)celui qui parle (émet quelquechose est actif dans la transmission, par la parole, caractéristique ultime de l'Humain)
    2°) celui qui écoute, est passif dans la transmission de La Parole (Divine)
    3°) le statut du dessous, qui représente le règne animal et végétal, qui ne pense qu'à survivre. ("léfarnès")
    Et si on reprend le Kal vah'omer du début:
    Si déjà le rocher [créature d'Hachem] qui ne parle ni n'entend ni n'a besoin de se sustenter [faisant parti du minéral, plus bas niveau de tous les règnes] obéit à son créateur ("makom") [en cela qu'il fait jaillir SON eau, respectant ainsi les lois naturelles imposées par Le Créateur] (pour rester ds le pshat du chiour)
    Alors nous [bnei israel (plus haut niveau du règne des êtres vivants: parlant au Divin) ayant fait preuve de foi dans le désert, (puisque miracles) et donc ne nous restant "plus qu'à" agir, notre foi étant pour nous ce que la nature est au rocher, on se retrouve être "des rochers de la foi", cela est encré en nous comme les eaux naturelles le sont en le rocher, on est donc comparables au rocher (et cela repousse la question du yetser ara, si on se place au niveau atteint dans le désert dont la foi était devenu la Nature)] KAL VAH'OMER [devrions nous obéir à la voix d'Hachem [lorsque nous serons en terre Sainte, soumis aux lois de la nature, devenu à l'état de "rocher de la foi" , simples minéraux dont la foi est cristallisée], et ressembler ainsi au rocher de moshé, qui, minéral, aurait obéit aurait sorti, extirper son naturel sous simple ordre vocal, ce qui pour nous reviendrai à exprimer notre foi en maassim.]]]]

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  7. Moché, j'avoue que j'ai un peu de mal à adhérer à ton interprétation. Simplement, parce que si vraiment ce que Rachi voulait dire ce que tu proposes, alors il aurait utilisé la terminologie bien connu de "Domème, Tsoméa'h, Haï et Médaber". Tu vois, pour dire "Eino Médaber, ..., veino tsarikh léparnassa" il aurait simplement dit "Domème"!!!
    Non?

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  8. Pour moi, le tsad hachavé fait aussi partie de la lecon de moché aux bnei Israel!

    Oui, mes enfants, vous etes comme ce Rocher: vous etes des creatures de D et vous faites partie d'un projet divin. Mais pourquoi le rocher donne-t-il de l'eau? Parce que c'est naturel. En fait, c'est naturel de s'inscrire dans le projet divin.

    Et le kal valhomer est que si déjà un rocher [qui n'a aucune interaction et qui n'a absolument aucun interet a obéir a Hachem puisque Eino Tsarikh leparnassa] obéit a Hachem alors a plus forte raison nous.

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  9. Et effectivement, si Moché avait parlé, le rocher aurait donné ses eaux. Et cela aurait été un miracle. Mais comme le dit rav Fohrman, cela aurait été un miracle de transition. Le rocher dans ce cas là n'aurait pas été contraint, il aurait agit de son propre chef...

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  10. Ce qui m'a bouleversé, au delà du développement qui est remarquable, c'est la définition que le Rav donne des lois de la Thora: ce qui permet de raffermir le lien avec Hachem, et c'est la seule connexion que l'on a avec LE KADDOSH, LE Nivdal, L'au delà de l'être.
    Ça fait réfléchir.

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  11. "S'inscrire dans le projet divin" et "Obéir à Hashem" sont équivalents pour les créatures autres que l'homme (à excepter le cas de l'arbre dans Béréchit, qui a "désobéi" en faisant pousser un arbre au tronc insipide au lieu d'un arbre-fruit, ce cas étant sujet à réflexion, comme d'autres cas, d'ailleurs, qu'on trouve dans la Torah et où un être non libre enfreint la parole d'Hashem).
    Dans le cas de l'homme, ça n'est qu'une condition suffisante: il suffit d'obéir pour entrer dans le projet divin. Mais entrer dans ce projet ne nécessite pas mon obéissance, comme Moshé (Boc) l'a précisé avec l'exemple de Pharaon.

    Kal Vah'omer de Rashi:
    Citant Arié: ""si déjà un rocher s'inscrit aussi harmonieusement dans le projet divin, alors qu'il n'a même pas de récompense, à plus forte raison moi, qui en plus aurai une récompense, ai-je envie d'en faire partie!". En quoi la récompense change la donne? Pourquoi ça répond au problème, à savoir "Qu'est-ce que vient faire ce cal vah'omer?" ? J'ai une récompense, ok. Mais il y a aussi la dualité propre à l'homme, celle qui le tire vers le mal, ce que n'a pas le rocher, qui lui obéit naturellement. On compare les carottes et les pingouins et ça pose un vrai problème.

    L'interprétation de Moshé (Boc) contredit celle de Rav Fohrman: ce dernier soutient que justement, la emouna des Bnei Israel dans le désert n'était pas si complète en ce sens qu'ils étaient "oppressés" par les miracles. Ils seront au stade de "rocher de la foi" dès lors qu'ils auront entretenu leur emouna dans un cadre aussi naturel qu'Eretz Israel, ce qui n'est pas encore le cas, justement, puisque l'épreuve du rocher était là pour qu'ils commencent à devenir des "rochers de la foi".

    Disons que le Ben Israel, en voyant le rocher faire sortir son eau sous la seule parole de Moshé (Rabénou) (=celle d'Hashem) se dise "Ah, ça s'est pas passé comme ça la dernière fois! On avait frappé le rocher! Peut-être serai-je bientôt appelé à observer la parole d'Hashem de façon plus autonome, de la même manière que le rocher a sorti son eau quasi-spontanément." C'est l'interprétation que donne Rav Fohrman du Rashi.
    Mais ceci est tout au plus un parallèle entre le rocher et l'homme. Où est le kal vah'omer??????

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  12. Hello Esther,
    Mon commentaire plus haut ne te convient-il pas?

    En substance:
    1. Le Tsad Hachavé est en soi une leçon qu'aurait donné ce miracle de transition (parler et non frapper).
    2. L'homme a un intérêt à obéïr à Hachem: il dépend de lui pour sa parnassa. Le Rocher n'en a pas besoin. Voila le Kal Vakhomer tout simple.

    Qu'en penses-tu?

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  13. Le rocher n'en a pas besoin, mais il n'a pas non plus le choix! C'est là qu'il y a une impasse.
    Qu'est-ce que ça change, que le rocher ait un intérêt ou pas à obéir, s'il n'en a pas le choix à la base? Lui n'a pas à se dire "Il y a quoi à la clé de mon acte?" vu qu'il le fera quoi qu'il arrive.
    A la rigueur, imaginons qu'au lieu de comparer un Ben Israel à un rocher (faut le faire, quand même!) on le compare à un humain quelconque, pour lequel la parnassa n'est pas la conséquence de son obéissance à Hashem, mais de ses efforts physiques pour l'obtenir (un gars qui passe sa vie à bosser, par exemple, donc gagne plus, indépendamment de son attachement à la Torah). Imaginons que cet humain observe les mitsvot de façon intègre. Eino tsari'h le parnassa (pas au sens absolu du terme ,cette fois-ci, contrairement au rocher, mais au sens où il n'a pas besoin d'obéir Hashem pour se sustenter), et il obéit quand même! Kal Vah'omer devrais-je obéir.
    Mais là il n'y a pas de rapport entre les deux.

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  14. Voici une compréhension du Rachi, elle vient du Mizrahi. Il développe son explication en réponse au Ramban, qui lui semble refuser l'idée que Moshé ait fauté en frappant le rocher au lieu de lui parler. Bah oui, puisque de toute façon, "hakol chavé etsel haséla", dit le Ramban! Qu'est-ce que ça peut bien changer qu'on tape ou pas le rocher, il sent rien de toute façon!

    Ca change. Le mizrahi dit que les Bnei Israël voyaient Moshé faire le tri entre les différents rochers pour voir lequel pourrait "marcher", car il avait cette capacité de reconnaître les rochers "fertiles". Du coup, si Moshé frappe, c'est juste qu'il fait sortir l'eau qu'il y a dans la roche. Donc c'est un truc normal.

    Si Moshé parle, que le rocher soit fertile ou non, "eino chomea", donc le fait qu'en sorte de l'eau est une grande chose. Et ici le kal vah'omer intervient: si déjà le rocher qui ni ne parle, ni n'entend, ni n'a besoin de se sustenter écoute Moshé, à plus forte raison nous. Jusque là ce que dit le Mizrahi.

    Je comprends comme ceci (libre à vous de me contredire):
    le rocher n'a strictement aucune bonne raison de faire sortir de l'eau sous prétexte que Moshé lui parle, car il n'entend pas, ni ne parle. Et, contrairement à des végétaux, par exemple, qui transpirent, ce rocher n'a aucun besoin de sortir de son eau (à supposer qu'il en contienne). Eino tsarih leparnassa: pour son propre équilibre, il n'a pas besoin de faire sortir de l'eau.

    Ah, mais il écoute ce que lui dit Moshé, à plus forte raison nous, qui avons les moyens et d'entendre, et de comprendre, devrions-nous écouter ce que nous dit Moshé.

    On pourrait aussi s'interroger: oui mais, si ça se trouve Hashem a fait en sorte que pile quand Moshé parle, le rocher fait jaillir de l'eau. Et on retombe sur nos pattes: eino tsarih leparnassa. Il n'a pas à sortir de l'eau!

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  15. Hello à tous,

    C'est très intéressant ce que tu dis Esther, et j'aime beaucoup le Mizrahi que tu rapportes.

    Moi, à la lumière de ce qu'il dit et de ce que tu rapportes en ton nom, je comprendrais qu'on dise : "si déjà le Rocher obéit alors qu'il n'en a pas besoin (eino tsarikh leparnassa), alors à plus forte raison nous, qui avons besoin d'Hashem, devons-nous lui obéir".

    Ce qui me gêne, c'est que je n'ai pas besoin de dire qu'il n'entend pas pour faire ce kal vakhomer.

    D'où ma proposition suivante:
    - le kal vakhomer de Rachi se fonde uniquement sur le côté kal du rocher qui est "eino tsarikh leparnassa", à mettre en regard de notre côté 'hamour à nous les hommes, celui d'être tsarikh leparnassa.
    - mais pour que les Bnei Israël puissent faire ce kal vakhomer, encore faut-il qu'ils voient que le rocher obéit! Or si Moshé frappe, ils ne peuvent pas le déduire car ils peuvent très bien se dire que ça fait partie des lois de la Nature de faire sortir de l'eau lorsqu'on frappe à tel endroit. En revanche, si en parlant à quelqu'un qui n'a pas d'oreille, on voit ce quelqu'un obéir, c'est qu'il reçoit l'ordre d'une autre façon, d'une façon non naturelle, et qu'il accepte d'obéir. Dès lors, le kal vakhomer a la voie libre...

    Il faut relire le Rashi dans le texte pour voir si ça peut se lire en particulier si on peut faire démarre le kal vakhomer à "vééno tsarikh leparnassa".

    C'était important de leur apprendre ça car, comme le dit Rav Fohrman, ils allaient quitter le monde des miracles et entrer dans le monde naturel, Israël. Là-bas, pas de miracle apparent, et il y avait le risque de penser que dès lors qu'on sort des miracles, ça veut dire qu'Hashem, tel l'horloger, a figé le monde et que celui-ci va vivre sa vie tout seul. Autrement dit, il n'intervient plus, le projet divin est terminé.

    En parlant au Rocher, Moshé aurait permis aux Bnei Israel de comprendre que même dans le cadre naturel, il y a la présence d'Hashem, incontestable ici puisqu'un rocher qui n'a pas d'oreille obéit à la parole!

    Voilà, je ne crois pas que ça contredise ce que vous dites, mais ça me parle de le lire comme ça...

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